3-4 Dec 2015 Nice (France)
L'exclamation dans les grammaires françaises XVI-XVIIIe siècles
Pagani-Naudet Cendrine  1@  
1 : Bases, Corpus, Langage  (BCL)  -  Website
CNRS : UMR7320, Université Nice Sophia Antipolis (UNS)
Laboratoire BCL - UMR 6039 Université de Nice - Campus Saint-Jean d'Angely 3 24, avenue des Diables bleus 06357 Nice Cedex 4 -  France

L'exclamation dans les grammaires françaises XVI-XVIIIe siècles

Élaboration d'un concept ou construction d'un problème ?

L'exclamation passe pour avoir été longtemps délaissée par la grammaire, c'est du moins sur cette observation que débutent de nombreux articles et ouvrages qui lui sont consacrés. Proposer de faire l'histoire de l'exclamation dans les grammaires indique que nous ne validons pas a priori ce constat. Quand bien même il serait vérifié par l'examen des textes, ce fait reste à méditer : comment et pourquoi l'exclamation est-elle devenue un problème pertinent pour le grammairien ? Et que faut-il mettre sous le mot exclamation lorsqu'il entre dans le métalangage ?

Un regard sur les débuts de la grammaire française montre que l'exclamation est un construit historicisé. Les difficultés à l'appréhender, la variété et la complexité des faits envisagés résultent de la lente stratification de problèmes : aux débats anciens sur l'interjection, s'ajoutent les discussions autour du point d'admiration, que viennent enrichir les problématiques issues de la rhétorique. L'évolution de la terminologie, marquée par l'adoption progressive du terme exclamation emprunté à la rhétorique (le point admiratif devient le point d'exclamation) rappelle que la question posée est d'abord celle d'un transfert conceptuel, transfert dont il convient d'interroger les causes et de mesurer les effets.

L'exclamation telle que confusément nous l'appréhendons est en outre solidaire de la manière dont l'interjection et le point d'exclamation ont été abordés à partir du XVIe siècle. Dans l'histoire de l'exclamation, la question de la ponctuation est loin d'être négligeable. La nécessité de statuer sur l'usage de ce signe polyvalent a stimulé l'activité des grammairiens. Déterminer sa place et ses conditions d'emplois, expliciter sa valeur conduit à renforcer ses liens avec l'interjection et à établir des listes d'énoncés susceptibles de le recevoir. Dans cet effort de systématisation, la grammaire tend à privilégier ce qu'exprime l'énoncé, perdant de vue la dimension co-énonciative de l'exclamation. Celle-ci était pourtant au cœur de la perspective rhétorique, et à ce titre parfaitement prise en charge au XVIe siècle par les grammairiens qui empruntent à cette discipline, mais aussi par tous ceux qui cherchant à établir les normes de l'intercompréhension ne perdent pas de vue que toute phrase articulée manifeste la prise en compte de l'autre.

Bibliographie

 

I. Sources primaires

 

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GIRARD., R., 1747, Les vrais principes de la langue françoise, Paris, Le Breton.

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VALLARD, J., 1744, Grammaire françoise, Paris, Desaint et Saillant

 

II. Articles et ouvrages

 

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